Étude de cas sur un café à chats

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Un café à chats végane en plein coeur de Montréal

En juin dernier, le Café Venosa a ouvert ses portes sur le boulevard St-Denis à Montréal. Pour une première fois, il s’agit d’un café à chats n’offrant que de la nourriture végétalienne — une cohérence qui s’imposait comme nécessaire. (En effet, quel serait l’intérêt d’aller flatter des chats tout en croquant dans des paninis au jambon et fromage?) Mais au-delà de son attrait ludique et inusité, et de son menu fort appétissant, ce qui m’a frappé de cet endroit est qu’il pouvait exemplifier des idées que je défends à travers mon parcours académique et militant.

J’ai discuté auparavant de la théorie de la citoyenneté animale proposée par Sue Donaldson et Will Kymlicka, théorie qui suggère entre autres de considérer les animaux domestiqués comme des membres à part entière de nos sociétés et de leur octroyer le statut de citoyen. Et si le Café Venosa nous offrait une fenêtre sur une possible zoopolis, du moins sur une partie de celle-ci?

Je propose ici de montrer de quelle manière un café à chats végane nous permet de nous pencher sur trois aspects de la citoyenneté animale: la question de l’inclusion sociale, l’instauration des règles du vivre ensemble et le problème des conditions de travail. Il est probable que les fondateurs de ce café n’avaient pas de telles intentions en tête, mais leur initiative nous invite bien à mieux explorer nos idées et pratiques sur des thèmes politiques de grande importance. Lire la suite

La portée morale et politique de la capacité à éprouver du plaisir

Élan léchant de la neige - Mark Peter

Un élan attrapant des flocons de la neige avec sa langue. © Mark Peters.

La prédominance et l’omniprésence de la souffrance

À la fin de mon précédent billet sur l’antiperfectionnisme, je soulevais que l’éthique animale est presque monopolisée par la question des devoirs négatifs, c’est-à-dire des devoirs de ne pas nuire à autrui. Étant donné les tortures indicibles que l’on inflige à un nombre vertigineux d’animaux non humains — et ce, pour satisfaire des caprices totalement triviaux — il est normal de consacrer autant d’efforts pour expliquer à nos contemporains pourquoi les animaux ont un intérêt à ne pas souffrir et à ne pas être tués. Puisque ces notions ne vont pas encore de soi, il est primordial de devoir les répéter, autant de fois que nécessaire et de différentes manières, et de toute urgence.

En revanche, la vie des animaux ne saurait se réduire à éviter la souffrance. Elle est en effet beaucoup plus complexe, étant mue par la recherche de stabilité et de confort mais aussi d’expériences agréables et enrichissantes et par la création de relations privilégiées avec autrui. Ainsi, même si on cessait de faire souffrir et de tuer les animaux de manière directe, cela ne signifie pas pour autant que l’on remplisse toutes nos obligations à leur endroit. C’est pourquoi il faut aussi être conscient des préjugés que l’on risque de renforcer en véhiculant un discours qui se limite à ne pas faire de mal aux animaux: il faut aussi parvenir à expliquer que ce qui constitue leur vie est digne d’être valorisé et respecté.

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Lorsqu’il est impossible d’être végétalien

« Le véganisme n'est pas un sacrifice, c'est une joie! » Mais si c'était plus difficile dans certains cas?

« Le véganisme n’est pas un sacrifice, c’est une joie! » Mais si c’était plus difficile dans certains cas?

On peut être d’accord avec les arguments en faveur du véganisme et des droits des animaux, mais toutefois avoir de la difficulté à les mettre en pratique. La plupart du temps, ces difficultés sont d’ordre psychologique et social. C’est pourquoi j’ai proposé différents trucs pour faire la transition (ainsi que des ressources) et j’encourage ceux et celles qui se sentent isolé-e-s à se lier d’amitié avec d’autres véganes.

Pour d’autres personnes, en revanche, les difficultés à devenir végétalien sont plutôt d’ordre médical ou biologique. Même si l’Association des diététistes des États-Unis affirme qu’ « une alimentation végétalienne bien planifiée et les autres types d’alimentations végétariennes sont appropriés à toutes les périodes de la vie, y compris la grossesse, l’allaitement, la petite enfance, l’enfance, et l’adolescence » et que ce message est corroboré par de nombreuses institutions sérieuses à travers le monde, il pourrait exister des exceptions. Que ce soit à cause d’allergies, d’intolérances, de maladies ou autres problèmes de santé, il semble que les défis à la transition vers le végétalisme ne soient pas les mêmes pour tous. Ces cas sont sans doute assez rares, mais ils existent bel et bien. Dans ces circonstances, que peut-on faire?

Dans ce billet, j’explore certaines avenues possibles pour aider de telles personnes à faire le maximum pour devenir végétaliennes. Certaines de ces idées seront controversées et d’autres demeurent irréalistes pour l’instant, mais justement, l’important est que ce soit discuté et que nous cherchions des solutions. Car le but n’est ni d’abandonner ces personnes en continuant de prétendre que le végétalisme est facile universellement, ni de laisser croire qu’il n’y a aucune solution à ce problème! Alors voici les quelques possibilités que j’aborde et qui sont compatibles avec les droits des animaux:

À noter aussi que peu importe l’étendue et la gravité des allergies, intolérances et maladies compliquant le projet d’être végétalien, rien n’empêche d’adhérer théoriquement aux droits des animaux et de boycotter les autres formes d’exploitation animale. Par exemple, on peut avoir des obstacles médicaux à être végétalien mais cesser d’acheter des produits testés sur les animaux, d’aller au cirque et au zoo, de porter de la fourrure et du cuir, etc. — et surtout, on peut sensibiliser son entourage au sujet des droits des animaux et les encourager à devenir véganes (notamment s’ils n’ont pas d’excuse médicale!). Loin d’être hypocrite, il s’agit plutôt de promouvoir l’importance de ce projet moral et collectif tout en reconnaissant ses limites pour certaines personnes. Et comme je souhaite le suggérer, ces limites ne sont pas insurmontables.
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